Par: Kathleen Sandusky
24 Avr, 2024
Comme tout parent d’un préadolescent ou d’une préadolescente obsédée par son iPad peut en témoigner, les technologies de l’IA sont devenues profondément ancrées dans la vie et l’imagination de nos enfants. Parmi les nombreuses incidences, citons les algorithmes « Pour toi » qui gardent les yeux des jeunes rivés sur TikTok; les débats des conseils scolaires visant à déterminer si l’IA générative aide ou nuit en classe; et le spectre effrayant des technologies perfectionnées de leurre des enfants, qui pourraient se servir de l’IA pour imiter les enfants en ligne.
Une IA responsable envers les enfants : perspectives, implications et pratiques exemplaires, un nouveau rapport de la série Réflexions sur l’IA du CIFAR à l’intention des responsables politiques, affirme que bien qu’il n’y ait pas de temps à perdre dans la réglementation de l’IA, les responsables politiques ne doivent pas faire l’impasse sur certaines étapes cruciales afin d’assurer la protection des droits des enfants.
Les autrices constatent que, bien que de nouveaux règlements et lignes directrices visant à garantir une IA responsable voient rapidement le jour au Canada et ailleurs dans le monde, les enfants ont été en grande partie exclus de ces discussions politiques plus larges ou n’ont été que brièvement mentionnés en tant qu’utilisateurs et utilisatrices vulnérables aux préjudices. En outre, les lois et règlements en vigueur, comme la Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques, ont tendance à se concentrer sur des stratégies axées sur la protection de la vie privée et sur les consommateurs et les consommatrices, sans prendre en considération l’ensemble des incidences actuelles et potentielles de l’IA sur les enfants, qu’elles soient positives ou négatives.
« Nous proposons d’examiner les orientations internationales existantes en vue d’une approche plus large, fondée sur les droits », explique Sara M. Grimes, l’une des autrices du rapport, qui est professeure et titulaire de la chaire Bell University Labs en interaction humain-ordinateur de l’Université de Toronto. « Si notre réglementation sur l’IA continue de se concentrer étroitement sur la protection de la vie privée et des consommateurs et consommatrices et omet les considérations relatives aux nombreux autres droits des enfants, le Canada risque de ne pas tenir compte de la portée plus large des expériences vécues et des besoins des enfants lorsqu’ils interagissent avec les technologies de l’IA, ce qu’ils continueront certainement à faire. »
Selon les autrices, parmi les droits plus larges des enfants dans les domaines numériques qui pourraient être négligés par des cadres strictement axés sur la protection de la vie privée figurent le droit d’accéder à l’information, de jouer et de participer à la vie culturelle, ainsi que d’être à l’abri de la discrimination, de l’exploitation commerciale et de la maltraitance.
S’il reste encore beaucoup à faire pour comprendre et combler ces lacunes, les autrices affirment que les responsables politiques peuvent s’appuyer sur des orientations utiles déjà mises à la disposition de la communauté mondiale. Il s’agit notamment de l’Observation générale 25 des Nations unies, qui a mis à jour la Convention relative aux droits de l’enfant. On y indique comment les pays peuvent faire respecter les droits de l’enfant dans l’environnement numérique.
Ce nouveau rapport politique souligne également l’importance d’inclure le point de vue des enfants dans l’élaboration et l’examen de la réglementation en matière d’IA, un processus trop souvent négligé. À cette fin, le rapport comprend un cadre pour le développement de l’IA avec et pour les enfants. On y propose des activités pratiques qui peuvent aider à orienter les conversations avec ceux-ci au sujet de l’IA.
Le rapport se termine par une liste de six points clés à retenir que les responsables politiques devraient garder à l’esprit au moment de s’atteler à la lourde tâche de réglementer cette technologie en évolution rapide au profit d’une population à la fois vulnérable et très diversifiée.
« Compte tenu de la vitesse avec laquelle l’IA progresse, les responsables politiques peuvent se sentir dépassés dans leur tentative de protéger les enfants », indique Mme Grimes. « Mais ce qui est positif, c’est que nous pouvons travailler ensemble en tant que communauté mondiale. Nous disposons déjà de recherches approfondies dans plusieurs domaines concernant les incidences sociales, éthiques et développementales des technologies centrées sur les données sur divers groupes d’enfants et d’adolescents. En stimulant les échanges et les applications pratiques de ces stratégies au bénéfice des responsables politiques, et en incluant les enfants dans l’élaboration des règlements, nous espérons faire en sorte que tous les enfants soient protégés contre les dangers possibles des technologies de l’IA, tout en étant en mesure de tirer parti de leurs avantages potentiels. »
Une IA responsable envers les enfants : perspectives, implications et pratiques exemplaires, a été publiée aujourd’hui par le CIFAR. Ce rapport a été coécrit par Sara M. Grimes, professeure et titulaire de la chaire Bell University Labs en interaction humain-ordinateur de l’Université de Toronto; Alissa N. Antle, professeure à l’Université Simon Fraser; Valerie Steeves, professeure à l’Université d’Ottawa et coresponsable du eQuality Project; et Natalie Coulter, professeure agrégée et directrice de l’Institut de recherche sur les compétences numériques de l’Université York.
Pour de plus amples renseignements, veuillez communiquer avec :
Gagan Gill
Responsable de programme, IA et société, CIFAR
À propos de Réflexions sur l’IA du CIFAR
Réflexions sur l’IA du CIFAR est une série d’exposés de politiques qui invite des spécialistes interdisciplinaires à rédiger des synthèses accessibles sur les implications pratiques, sociétales et politiques de l’IA et des nouvelles technologies. Ces exposés visent à accroître le leadership intellectuel du Canada sur des questions importantes pour les responsables politiques, les scientifiques, les autorités de réglementation et les autres instances désireuses d’étudier et de pallier les répercussions sociétales de l’IA.
À propos de la Stratégie pancanadienne en matière d’IA du CIFAR
La Stratégie pancanadienne en matière d’IA du CIFAR stimule la recherche de pointe, forme la prochaine génération de leaders en IA d’origines et de disciplines diverses et favorise la collaboration intersectorielle axée sur l’innovation, la commercialisation et l’adoption responsable de l’IA. Nos trois instituts nationaux d’IA – Amii à Edmonton, l’Institut Vecteur à Toronto et Mila à Montréal – constituent les pôles dynamiques de l’écosystème florissant de l’IA au Canada. Financés par le gouvernement du Canada, nous bâtissons une communauté de recherche dynamique, représentative et talentueuse de renommée mondiale qui vise à créer des solutions d’IA transformatrices et responsables, et ce, pour les personnes et la planète.