FAVORISER LA RÉSILIENCE DE LA TERRE
La sécurité alimentaire
Par : Liz Do et Alison Rutka
24 Oct, 2023
Les effets des changements climatiques se font sentir à l’échelle mondiale à un rythme alarmant. Le CIFAR est à l’avant-garde de la lutte contre ce phénomène. Cette série spéciale, Favoriser la résilience de la Terre, examine comment la communauté du CIFAR — par-delà les frontières, les rôles et les disciplines — a un impact significatif sur la concrétisation de changements importants.
Découvrez comment les événements météorologiques extrêmes et la hausse des températures sont en passe de créer de plus grandes inégalités alimentaires à l’échelle mondiale et ce que les scientifiques du CIFAR, comme Sarah Gurr, font pour y remédier.
Vous souhaitez en savoir plus sur ces recherches?
Regardez maintenant : Conférences du CIFAR : Favoriser la résilience de la Terre, mettant en
vedette des spécialistes de notre série.
Photo : England Studios
Avec l’aggravation de la crise des changements climatiques, les phénomènes météorologiques mondiaux et la hausse des températures risquent d’endommager et de détruire les cultures à travers le monde, menaçant ainsi la sécurité alimentaire mondiale et exacerbant l’inégalité alimentaire.
Sarah Gurr, membre du programme Règne fongique du CIFAR : Menaces et possibilités, étudie comment le mouvement mondial des infestations fongiques touche l’approvisionnement agricole de la planète. Ces données lui permettent de comprendre comme jamais l’effet des changements environnementaux sur la sécurité alimentaire.
Gurr et son équipe de recherche surveillent les mouvements des agents pathogènes à partir de sources multiples. Elle note que les agents pathogènes migrent pour diverses raisons. Tout d’abord, les cultures génétiquement uniformes issues de la révolution verte mutent et deviennent résistantes aux fongicides d’utilisation courante. La mondialisation du commerce et du transport influence également le mouvement des ravageurs et des agents pathogènes des cultures, en particulier les organismes fongiques.
Les changements climatiques jouent aussi un rôle important. L’augmentation de la chaleur et de l’humidité influence le mouvement des agents pathogènes à l’échelle mondiale, de manière inattendue et indésirable. Non seulement la hausse des températures, en particulier dans l’hémisphère nord, favorise-t-elle le déplacement des organismes fongiques vers les cultures, note Gurr, mais l’humidité croissante engendre également des épisodes de conditions météorologiques extrêmes.
« Les phénomènes météorologiques extrêmes touchent de très près le Canada. Après une récente tornade aux États-Unis, les vents de la tornade ont transporté au Canada des spores que l’on n’avait jamais observées auparavant sur le blé », explique Gurr.
La migration d’agents pathogènes à grande échelle pourrait faire des ravages dans l’approvisionnement alimentaire mondial. Toutes les grandes cultures actuelles — riz, blé, maïs, soja et pommes de terre — sont sensibles aux maladies fongiques.
« Le blé, le maïs et le riz couvrent 40 % des terres agricoles mondiales importantes pour la production de calories. Même si nous pouvons dans une certaine mesure protéger une culture comme le riz, par exemple, à l’aide de fongicides, nous perdons encore entre 12 et 23 % de la récolte chaque année à cause de maladies », explique Gurr.
La migration des agents pathogènes liée aux changements climatiques accélère également les inégalités alimentaires à l’échelle mondiale. Gurr explique qu’au fil de la hausse des températures, la capacité à cultiver diminue, en particulier dans les régions plus chaudes situées le long de l’équateur. Si l’on ajoute à cela l’augmentation de la population au fil du temps, la demande agricole dépasse l’offre.
Gurr travaille à la mise au point de modèles prédictifs de la migration des maladies touchant les cultures du monde entier qui aideront les scientifiques à comprendre comment et quand les agents pathogènes peuvent avoir un impact sur l’approvisionnement alimentaire de la planète. La bonne nouvelle, c’est qu’il est possible de prévoir le mouvement des agents pathogènes, mais la modélisation est complexe. Les modèles actuels sont dérivés de données fongiques connues associées à des profils de température pour la croissance des organismes fongiques, à des données sur la température et l’humidité et à des analyses prévisionnelles du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat, et sont comparés à des données réelles sur le terrain. Les résultats sont frappants.
« Ce que nous observons avec les changements climatiques, c’est que les agents pathogènes vont progresser. Nous avons démontré qu’ils parcourent environ huit kilomètres par an, explique Gurr. Les agents pathogènes finiront par rattraper les cultures. Cela va radicalement changer les systèmes agricoles aux États-Unis, en Europe et en Chine, par exemple. Nous allons assister à un mélange complet des agents pathogènes du monde entier. »
Gurr et son équipe se concentrent sur de nombreuses approches pour lutter contre les menaces du règne fongique. Les membres du CIFAR étudient la possibilité de modifier les gènes des cultures afin d’accroître leur résistance à la maladie. De plus, ils conçoivent de nouveaux antifongiques pour mieux protéger les cultures contre les maladies fongiques. Dans un article paru dans Nature en 2022, Gurr et ses collègues ont publié des recherches faisant état de nouveaux composés antifongiques qui protègent les céréales contre des maladies comme la septoriose du blé et la pyriculariose du riz.
Il est possible de renverser ces prédictions, mais il faudra des recherches interdisciplinaires accélérées afin de réunir divers domaines d’expertise. Voilà pourquoi une organisation comme le CIFAR, avec sa capacité à rassembler de brillants cerveaux, change vraiment la donne, explique Gurr.
Elle cite en exemple des scientifiques comme Hailing Jin, membre du programme Règne fongique, qui travaille à lutter contre les phytopathologies grâce à l’interférence par ARN entre les phytopathogènes et les pathogènes fongiques. « Quand il s’agit de trouver des solutions, je fais appel à des membres du CIFAR, car il s’agit d’une équipe brillante », déclare Gurr.
« Mon travail au sein du programme Règne fongique du CIFAR m’amène à porter un regard nouveau sur mes recherches », ajoute Gurr à propos de l’impact de l’organisation sur l’avancement de ses travaux. « Les discussions avec mes collègues du CIFAR ont débouché sur une série de projets destinés à mieux comprendre les mouvements des organismes fongiques dans un monde en réchauffement et les changements dans leurs modes de virulence. Ces travaux pourraient conduire à des solutions susceptibles d’améliorer la sécurité alimentaire à l’échelle mondiale. »
Comment le CIFAR vous aide-t-il à mener des recherches pertinentes pour lutter contre les changements climatiques?
« Les discussions avec mes collègues du CIFAR ont débouché sur un éventail de projets visant à mieux comprendre les mouvements des organismes fongiques dans un monde en réchauffement ainsi que les changements dans leurs modes de virulence. Ces travaux pourraient mener à des solutions susceptibles d’améliorer la sécurité alimentaire à l’échelle mondiale. »
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