Par: Jon Farrow
24 Août, 2020
Informaticien interdisciplinaire, Mark Daley nourrit des intérêts très variés et possède de solides compétences en matière d’administration et de direction.
En plus d’enseigner dans six départements à l’Université Western (informatique, biologie, épidémiologie et biostatistique, génie électrique et informatique, mathématiques appliquées, et statistiques et sciences actuarielles), Daley préside le conseil d’administration de Calcul Ontario, et siège au conseil consultatif du Fonds pour la recherche en Ontario et au conseil d’administration de l’ICES. Il est également cofondateur de CanCOVID, un réseau d’experts composé de chercheurs, de collaborateurs cliniques et de professionnels de la santé canadiens qui se penchent sur la COVID-19. Il a été vice-président associé (recherche) de l’Université Western de 2015 à 2019 et, en 2019, il a été nommé conseiller spécial du président de l’Université Western en matière de stratégie de données.
Dirigeant énergique et créatif, Daley veillera à ce que les programmes de recherche du CIFAR continuent à s’attaquer aux questions les plus importantes auxquelles sont confrontées la science et l’humanité, tout en repoussant les limites de la recherche.
Qu’est-ce qui vous a attiré au CIFAR?
Je crois aux valeurs de l’organisation. Mon propre parcours de chercheur a été profondément interdisciplinaire, la recherche interdisciplinaire me procure beaucoup de joie et je pense avoir fait de petites, mais bonnes, contributions au monde.
Le CIFAR illustre l’importance de la recherche interdisciplinaire et de la recherche fondamentale d’avant-garde et affiche des normes élevées en matière d’excellence et d’impact. Cela est en parfaite adéquation avec ma propre démarche en recherche.
Parlez-nous de votre parcours de recherche interdisciplinaire.
Après l’école secondaire, je pensais vouloir devenir musicien, si bien que j’ai étudié la composition musicale à l’École de musique Berklee de Boston. Mais je me suis ensuite enfui pour devenir mathématicien et informaticien.
J’ai passé la première partie de ma carrière à étudier le calcul, la notion abstraite de données ou d’intrants qui entrent, qui subissent une transformation et qui sortent. La plupart de mes premiers articles ne sont qu’un enchaînement de théorèmes et de preuves, et donnent lieu à une lecture très dense.
Ensuite, l’idée du calcul comme processus général pour examiner le monde a davantage suscité mon intérêt. Très vite, j’ai commencé à noter la présence du calcul partout où je regardais. Je me suis mis à examiner les processus biologiques comme s’il s’agissait de calculs et je les modélisais en conséquence. Lorsque j’ai obtenu la titularisation à l’Université Western, la fluidité de ma démarche s’est d’autant plus intensifiée : je souhaitais mettre à profit mes compétences en informatique pour travailler à des problèmes intéressants auprès de personnes intéressantes. Cela m’a mené à de grands projets interdisciplinaires comme l’analyse d’un recueil de chants grégoriens médiévaux pour comprendre l’évolution de la mélodie avec ma collègue, Kate Helsen.
La meilleure décision que j’aie jamais prise a été d’envoyer un courriel à Mel Goodale.
Je pense que ce virage dans ma démarche a probablement été la deuxième meilleure décision de ma carrière. La meilleure décision que j’aie jamais prise a été d’envoyer un courriel à Mel Goodale.
La neuroscience me fascinait, car le cerveau est un exemple exceptionnel de calcul qui a évolué dans la nature. En 2011, j’ai écrit un courriel à Mel, qui allait devenir codirecteur du programme Cerveau, esprit et conscience du CIFAR, pour lui demander de faire une maîtrise en neuroscience lors de mon prochain congé sabbatique. Je n’étais qu’un simple professeur agrégé d’informatique et la plupart des professeurs titulaires auraient probablement supprimé mon courriel en un tournemain sans même le lire. Quinze minutes plus tard, je recevais une réponse de Mel : « Venez dans mon bureau tout de suite. »
Jody Culham et lui ont fini par devenir mes superviseurs et je suis retourné faire une maîtrise en neuroscience. Il s’agit de la meilleure décision de ma carrière, car j’ai rencontré tant de gens intéressants et j’ai tant appris. La neuroscience est déjà un domaine hautement interdisciplinaire et cela m’a permis de créer des liens avec de nombreux autres réseaux.
C’est donc un peu par accident que je me retrouve où je suis, mais l’enthousiasme est là.
Comment voyez-vous votre rôle à titre de vice-président à la recherche au CIFAR?
Je conçois la recherche comme un réseau complexe et le CIFAR constitue un nœud central dans ce réseau qui relie de nombreux chercheurs, décideurs et dirigeants de l’industrie.
Je vois mon rôle à titre de vice-président à la recherche comme une occasion de servir l’organisation et la communauté, d’agir comme facteur habilitant et de rassembler les gens.
Je vais écouter le réseau et demander quelles sont les avenues de recherche à venir, ce dont le monde a besoin, ce que nous pouvons offrir et comment nous pouvons mettre en relation les bonnes personnes pour faire les bonnes choses. Je vois mon rôle à titre de vice-président à la recherche comme une occasion de servir l’organisation et la communauté, d’agir comme facteur habilitant et de rassembler les gens.
En tant que vice-président à la recherche, je suis un rouage dans la machine qu’est le CIFAR. Toutes les aspirations que je souhaite réaliser concernent le CIFAR en tant que tout, car tout ce que nous faisons, nous le faisons ensemble, en équipe.
L’une des grandes forces du CIFAR réside dans les communautés de brillants universitaires, décideurs et dirigeants de l’industrie que nous réunissons. Quelles sont les caractéristiques d’une bonne communauté?
Pour un mathématicien comme moi, un réseau est un objet formel qui ne comporte que deux types d’éléments : des nœuds et des arêtes. Dans le cas présent, les nœuds correspondent à des personnes et les arêtes à des liens. Les seuls éléments qui composent un réseau de ce type sont les personnes et les liens qui les unissent.
La puissance de notre impact repose entièrement sur notre capacité à trouver les bons nœuds et à les mettre en lien de la bonne façon.
Le rôle du CIFAR est de réunir des réseaux où ces nœuds prennent la forme de personnes énergiques et intelligentes qui ont des contributions intéressantes à faire. Ensuite, il nous faut renforcer les arêtes, les liens, entre elles. La puissance de notre impact repose entièrement sur notre capacité à trouver les bons nœuds et à les mettre en lien de la bonne façon.
Cela dit, chacun de nos programmes de recherche est différent. Et l’une des grandes forces du CIFAR est que chaque programme est autonome. Chaque réseau a le loisir de s’autoréguler et de décider de la meilleure façon de rassembler et de mettre en relation un groupe diversifié de chercheurs. Ils déterminent leurs propres objectifs et nous leur offrons le soutien et l’aide dont ils ont besoin pour réussir.
Quels seront les changements importants à effectuer pour veiller à ce que le CIFAR demeure à la fine pointe de la recherche?
Cela fait très peu de temps que je suis en poste, il me faudra donc encore quelques mois d’écoute avant de commencer à donner mon avis en matière de changement!
Toutefois, je souhaiterais souligner à quel point je suis ravi du plan en matière d’EDI du CIFAR. L’équité et l’inclusion sont des impératifs moraux fondamentaux pour nous tous et un nombre croissant d’études démontre que des équipes diversifiées sont plus fortes que des équipes homogènes dans un vaste éventail de domaines, allant de la recherche en physique à la gouvernance d’entreprise. Je rêve d’un avenir où l’ensemble de l’humanité aura accès à la recherche et en tirera profit; une aspiration qui fait partie de l’ADN du CIFAR.
Si vous pouviez partager un repas avec n’importe quel chercheur, vivant ou mort, qui choisiriez-vous?
Il y a tant de personnes à qui j’aimerais parler, mais si je dois me limiter à l’une d’entre elles, je choisirais Alan Turing. La théorie du calcul a été mon premier amour en recherche et Turing a jeté les assises de ce domaine de façon si claire et si brillante. Plus tard dans sa carrière, il a fait toutes sortes d’autres choses. Par exemple, il a examiné comment les équations différentielles peuvent déterminer la présentation des motifs en biologie. Les premiers écrits de Turing ont profondément influencé ma vision du monde selon laquelle tout se fonde sur le calcul.