Par: Liz Do
6 Juin, 2023
La naissance du cosmos a fort probablement commencé par un big bang, il y a 13,8 milliards d’an-nées. Un univers primitif, chaud et dense a connu une expansion rapide pour créer les conditions physiques nécessaires à l’évolution de l’Univers et à la vie sur Terre.
En théorie, voilà comment tout a commencé. Mais que savent les scientifiques sur l’avenir de l’Univers? Ou de la vie au-delà de la Terre?
Les travaux des membres des programmes Extrême Univers et gravité et Terre 4D du CIFAR, comme Katie Mack et Heather Graham, percent les mystères de la Terre et de l’espace.
Le destin du cosmos est l’une des plus grandes questions existentielles de l’humanité.
Mack passe son temps à étudier l’Univers primordial. Cela peut paraître contre-intuitif, mais c’est en explorant sa création que les cosmologues peuvent mieux comprendre sa fin.
«Ce qui s’est passé au début est étroitement lié à notre modèle cosmique ultime, qui est étroitement lié à ce qui se passera à la fin», explique Mack, membre du programme des chercheurs mondiaux CIFAR-Azrieli au sein du programme Extrême Univers et gravité, et titulaire de la chaire Hawking de cosmologie et de communication scientifique à l’Institut Périmètre.
Bien que la fin soit inconnue, il existe des scénarios prédominants, étayés par des concepts de la physique. Mack explore plusieurs de ces théories dans son livre The End of Everything.
L’une de ces théories porte sur la désintégration du vide qui, en raison de la métastabilité de l’Univers, pourrait entraîner sa désintégration soudaine en quelque chose de nouveau. Comme l’explique Mack, au tout début de l’Univers, les lois de la physique ont été quelque peu réécrites.
Un champ d’énergie appelé champ de Higgs a été «activé» après le Big Bang, et son comportement détermine la façon dont la physique des particules fondamentales fonctionne dans l’Univers. Cette transition a créé les conditions nécessaires à la création de tout ce qui existe dans l’Univers et qui se compose d’atomes : les étoiles, les galaxies, les planètes et tout le reste. Rien de tout cela n’aurait pu exister avant cette transition.
« Cependant, selon certaines interprétations des données, comme le champ de Higgs, l’Univers actuel n’est pas tout à fait stable, explique Mack. Il pourrait donc se transformer à nouveau en quelque chose d’autre. Si cela se produisait, les lois de la physique seraient à nouveau écrites de telle sorte que les atomes et les molécules ne pourraient plus exister. Et si cela se produisait, ce serait la fin.»
«Il est impossible de prédire ce phénomène, de le voir venir – la seule chose possible, c’est d’examiner les données. Et je puis dire qu’en l’état actuel des connaissances, même si c’était possible, il est très peu probable que ce phénomène se produise au cours des quelque 10 à la puissance 100 prochaines années», ajoute Mack.
Toutefois, la théorie qui recueille le plus d’assentiment est celle de la mort thermique : l’idée que l’Univers est actuellement en expansion et que cette expansion se poursuivra indéfiniment. L’accélération de l’expansion de l’Univers est causée par l’énergie sombre.
« Mais nous ne savons pas vraiment ce qu’est l’énergie sombre, nous savons simplement qu’elle accélère l’expansion de l’Univers, déclare Mack. Tant que ce phénomène durera, l’expansion de l’Univers continuera et s’accélérera de plus en plus. »
L’accélération de l’expansion signifie que l’Univers devient plus froid et plus sombre, car toute la matière et l’énergie se diffusent dans une région de plus en plus grande.
« Cela veut dire qu’au fl du temps, l’Univers est en quelque sorte en train de s’effacer.»
Bien que de telles théories puissent susciter un effroi existentiel, Mack trouve que ce travail est amusant et qu’il témoigne de la puissance de l’avancement de l’étude de la cosmologie. «Par exemple, au sujet de la théorie de la désintégration du vide : comment quantifer quelque chose d’aléatoire? Quelle en est la probabilité? Comment la calculer? C’est ce que nous faisons tout le temps en physique quantique.»
Mack étudie aussi la matière sombre – la mystérieuse substance gravitationnelle qui compose le gros de la matière dans l’Univers – ainsi que les trous noirs. Sur ce dernier point, elle espère travailler en étroite collaboration avec les membres du programme Extrême Univers et gravité pour approfondir le sujet – élucider leur formation, par exemple – qui n’est qu’un des nombreux mystères à résoudre dans le cadre de l’exploration spatiale.
Alors que Mack explore les origines du cosmos, Graham s’intéresse aux origines de la vie. Elle étudie en particulier comment détecter la «vie bizarre» : des biosignatures agnostiques sur les roches et dans les profondeurs du sous-sol, qui indiquent la présence de la vie, mais dans une forme différente de celle que nous connaissons habituellement.
«Vous et moi sommes constitués d’une sélection de molécules diverses et intrinsèquement beaucoup plus complexes que le type de molécules produites de manière abiotique – si nous allons dans l’espace et saisissons un astéroïde, comme nous le faisons avec la mission OSIRIS-REx, ou si nous capturons des particules solaires, ou si nous observons la chimie organique abiotique dans les profondeurs de la Terre, nous ne voyons jamais de molécules dépassant un certain niveau de complexité intrinsèque, comme c’est le cas dans la vie», explique Graham, membre du programme Terre 4D et scientifique au Goddard Space Flight Center de la NASA.
Cette complexité intrinsèque entraîne différentes réactions chimiques, notamment le métabolisme, qui représente la signature de l’évolution.
« Ce que nous envisageons, ce sont des chimies optimisées au fl de l’évolution qui représentent une complexité intrinsèque qui n’est pas observée et qui serait hautement improbable. Nous ne disons pas que c’est impossible. Mais cela a très peu de chances de se produire dans des systèmes cinétiques où vous attendez que la chaleur, la pression et le temps produisent des molécules spéciales», explique Graham.
Il devient de plus en plus important de mettre au point des outils et des techniques d’identification de la vie extraterrestre en parallèle avec l’accélération de l’exploration de l’espace. Les travaux de Graham pourraient permettre de déterminer avec certitude la présence d’une vie extraterrestre au-delà de la Terre.
«Je pense qu’une chose est devenue très évidente à mesure que le rythme de l’exploration s’est accéléré : nous devons mieux réfléchir aux expressions de la vie et à la manière dont nous limitons nos observations», explique Graham.
Les travaux de Graham soulignent également la possibilité d’une nouvelle forme de vie dans les profondeurs de la Terre, où des écosystèmes potentiels ne communiquent plus avec la surface depuis des milliards d’années.
«Je m’intéresse beaucoup à ce que la vie a de fonda-mentalement différent. Comment est-elle apparue? Pourquoi s’agit-il d’un processus inévitable? Il est assez facile de produire en laboratoire des choses qui ressemblent à des cellules et qui commencent à effectuer un métabolisme de base. S’agit-il donc d’un processus inévitable?», déclare Graham.
« Je pense que je suis vraiment motivée pour comprendre l’histoire de la vie. Je suis venue à l’astrobiologie non pas par curiosité innée pour les autres planètes, mais parce que je suis très intéressée par l’histoire de la vie sur Terre», ajoute-t-elle.
Le travail de Graham est très collaboratif, en particulier au sein du programme Terre 4D, dont les membres jouent un rôle particulièrement actif et participent énormément aux recherches de leurs collègues. Elle collabore actuellement avec des pairs du programme, notamment Jacqueline Goordial, membre du programme des chercheurs mondiaux CIFAR-Azrieli, en effectuant des travaux de laboratoire pour Goordial afin d’examiner la vie microbienne dans le sous-sol extrême, comme le pergélisol. Elle travaille aussi avec Barbara Sherwood Lollar, coresponsable du programme. «Nous utilisons des matériaux d’essai qu’elle nous apporte des mines profondes de l’Ontario.»
En définitive, Graham espère qu’il se fera aussi de la détection de vie «bizarre» et des expériences connexes sur d’autres planètes.
«Je souhaite la réalisation de véritables expériences. Une grande partie de l’exploration spatiale consiste à partir en observation et à voir ce qu’il y a là-bas. Et c’est très bien, mais j’aimerais que nous réalisions des expériences de catalyse sur une autre planète pour voir s’il y a des signes de transfert d’énergie auxquels on ne s’attend pas, a déclaré Graham. Je pense qu’il serait fabuleux de commencer à explorer les eaux des mondes océaniques à l’aide des méthodes que nous sommes en train de mettre au point. Par ailleurs, je me réjouis de la poursuite des investissements visant à ramener sur Terre des matériaux extraterrestres.»