Par: Kathleen Sandusky
8 Oct, 2024
Geoffrey Hinton, membre de longue date de la communauté de recherche du CIFAR, a reçu le prix Nobel de physique 2024. Il partage le prix conjointement avec John Hopfield « pour des découvertes et inventions fondamentales qui rendent possible l’apprentissage automatique avec les réseaux de neurones artificiels. »
« Le CIFAR est ravi de féliciter le professeur Geoffrey Hinton pour l’obtention du prix Nobel de physique 2024, a commenté Stephen Toope, président et chef de la direction du CIFAR. Depuis les années 1980, son leadership scientifique et sa persévérance dans le développement de réseaux de neurones artificiels ont été déterminants pour la révolution de l’IA d’aujourd’hui. Le CIFAR est fier d’avoir soutenu son travail au fil des décennies, et nous lui sommes reconnaissants de son leadership de longue date au sein des programmes de recherche en IA du CIFAR et de l’écosystème canadien de l’IA. »
Geoffrey Hinton a intégré la communauté du CIFAR en 1987, en tant que membre du tout premier programme du CIFAR, connu alors sous le nom d’Intelligence artificielle, robotique et société. Il venait de quitter les États-Unis pour s’installer au Canada. Nouvellement affilié à l’Université de Toronto et bénéficiant du soutien financier du CIFAR et du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada, il s’est lancé dans ce nouveau domaine de recherche qui, à l’époque, s’était heurté à un scepticisme généralisé et à une pénurie épisodique de fonds, aujourd’hui connus sous le nom d’« hivers de l’intelligence artificielle ».
Dans un article spécial paru en 1992 dans Scientific American, Geoffrey Hinton, qui était alors membre Noranda au CIFAR, a défendu avec passion le concept des réseaux de neurones artificiels. « … Tôt ou tard, a-t-il écrit, les études computationnelles de l’apprentissage dans les réseaux de neurones artificiels convergeront vers les méthodes découvertes par l’évolution. Lorsque cela se produira, un grand nombre de données empiriques diverses au sujet du cerveau prendront soudainement tout leur sens, et de nombreuses nouvelles applications des réseaux de neurones artificiels deviendront réalisables. »
Le consensus sur la faisabilité des réseaux de neurones artificiels allait en effet bientôt changer, avec le soutien du CIFAR et d’autres chercheurs et chercheuses qui reconnaissaient le potentiel de cette discipline. En 2004, Geoffrey Hinton et ses collaborateurs, dont Yoshua Bengio et David Fleet, ont proposé avec succès le lancement d’un nouveau programme au CIFAR, Calcul neuronal et perception adaptative (ou CNPA, qui s’appelle aujourd’hui Apprentissage automatique, apprentissage biologique). Geoffrey Hinton a dirigé le programme CNPA pendant 10 ans. Ce programme avait pour objectif « de tirer parti des connaissances acquises dans un large éventail de disciplines pour comprendre pleinement comment le cerveau apprend et interprète les renseignements visuels et d’utiliser ces connaissances pour construire des systèmes informatiques et des machines capables d’apprendre d’une manière semblable à celle de l’être humain ».
La liste des premiers membres du programme CNPA comprend bon nombre des sommités actuelles de ce domaine. Yoshua Bengio et Yann LeCun allaient ensuite partager avec Geoffrey Hinton le prix Turing 2018 pour leur développement de l’apprentissage profond. Parmi les autres premiers chercheurs internationaux attirés par le programme, dont beaucoup sont encore des membres du CIFAR, figurent Andrew Ng (qui allait cofonder DeepLearning), Sebastian Seung (aujourd’hui président de Samsung Electronics et responsable de Samsung Research), Max Welling (aujourd’hui vice-président de la technologie chez Qualcomm Pays-Bas) et Ruslan Salakhutdinov (ancien directeur de la recherche en IA d’Apple).
La représentation canadienne dans le programme CNPA comprenait les chercheurs principaux en IA Richard Zemel, Brendan Frey, Nando De Freitas et David Fleet. En 2005, reconnaissant l’occasion de jeter les bases d’une nouvelle génération de recherche en IA, le programme a lancé sa première école d’été, alors appelée École d’été sur le calcul neuronal et la perception adaptative. Reprenant le modèle d’été sur les modèles connexionnistes que Hinton a dirigée à l’université de Californie à San Diego, cette séance intensive d’une semaine a réuni à Toronto 28 personnes triées sur le volet.
Au cours des 20 années qui ont suivi, l’école d’été désormais connue sous le nom d’École d’été sur l’apprentissage profond et l’apprentissage par renforcement a grandi pour devenir une rampe de lancement renommée pour les carrières de milliers de chercheurs et de chercheuses en IA. Elle compte plus de 2 700 anciens étudiants et anciennes étudiantes.
Alors que le pôle canadien de recherche en IA et en apprentissage automatique continuait de se développer, le gouvernement canadien a pris acte d’une occasion remarquable d’innovation pilotée par des Canadiennes et des Canadiens ayant un potentiel d’incidence sociale et économique.
En 2016, un groupe de responsables provenant des quatre coins de l’écosystème canadien de l’IA, dont Geoffrey Hinton, a prodigué des conseils au CIFAR et au gouvernement du Canada alors qu’ils élaboraient la Stratégie pancanadienne en matière d’IA, la stratégie nationale du Canada relative à la recherche et aux talents dans le domaine de l’IA, qui était la première du genre dans le monde Par l’entremise de cette stratégie, le CIFAR a collaboré au lancement des trois instituts nationaux d’IA du Canada (Amii à Edmonton, Mila à Montréal et l’Institut Vecteur à Toronto). En plus d’être son cofondateur, Geoffrey Hinton occupe le poste de conseiller scientifique en chef de l’Institut Vecteur depuis sa création en 2017.
« Le leadership de Geoffrey Hinton à l’Institut Vecteur et au sein du programme Apprentissage automatique, apprentissage biologique du CIFAR a été inestimable pour l’écosystème canadien de l’IA, déclare Elissa Strome, directrice générale de la Stratégie pancanadienne en matière d’IA. Cette reconnaissance par le comité Nobel des contributions exceptionnelles du professeur Hinton atteste du bien fondé d’investir dans de remarquables personnes aux idées géniales et dans la poursuite d’une science ambitieuse, fondée sur la curiosité, qui est au cœur de la mission du CIFAR. »
Aujourd’hui, sous l’impulsion des profondes répercussions sociétales de l’IA, les membres du programme Apprentissage automatique, apprentissage biologique du CIFAR, dont fait partie Geoffrey Hinton, ont élargi leur champ d’investigation pour aborder des enjeux éthiques complexes liés aux environnements de recherche et de formation ainsi qu’à la mise en œuvre de l’IA. Leurs domaines d’intérêt comprennent l’exploration des conséquences sociétales actuelles et futures de la recherche en IA et la résolution des problèmes liés à la recherche et à la mise en œuvre de l’IA, notamment en matière de protection de la vie privée, de responsabilité et de transparence.
De même, bon nombre des titulaires de chaires en IA Canada-CIFAR recrutés et retenus au Canada grâce à la Stratégie pancanadienne en matière d’IA ont élargi leur champ d’investigation aux enjeux liés à la sécurité de l’IA et à son déploiement responsable. Cette année, le gouvernement canadien a annoncé le financement d’un Institut de la sécurité de l’intelligence artificielle, dont les détails seront communiqués prochainement.
Geoffrey Hinton lui-même a consacré une grande partie de son temps et de son engagement à aider le monde à se préparer aux répercussions sociétales généralisées de la nouvelle technologie transformatrice qu’il a contribué à créer.
Plaidant en faveur d’une concentration fortement accrue sur la recherche qui améliorera le contrôle humain responsable de l’IA et fera progresser la sécurité de l’IA, Geoffrey Hinton a affirmé dans une récente entrevue avec l’Université de Toronto, « Regardez combien de personnes travaillent à rendre ces choses meilleures et combien de personnes travaillent à les empêcher de devenir incontrôlables ». Notant que les priorités des grandes sociétés technologiques tendent à pencher vers le premier groupe, il a ajouté : « Où pouvez-vous avoir le plus d’impact? »